Sans
pour autant se faire d'illusions, la journaliste se rend au Quartier Général
de l'armée de l'air belge en compagnie de Jean-Pierre Petit. Alors qu'ils
croyaient devoir faire face au mutisme militaire de rigueur, le Colonel De Brouwer
explique dans les moindres détails, toute l'opération d'interception
qui s'était déroulée dans la nuit du 30 au 31 mars 1990.
De Brouwer leur montre les images d'une des boîtes noires d'un F-16 où
ils distinguent parfaitement l'objet vérouillé par le radar doppler
à impulsions des appareils. Le 22 juin 1990 est une date historique
dans l'histoire de l'ufologie. Pour la première fois, l'armée a
accepté de montrer, qui plus est dans une conférence de presse,
une pièce capitale d'un dossier au sujet duquel elle est toujours restée
extraordinairement discrète. Le Colonel De Brouwer est un personnage
clé dans ce contexte, c'est lui qui montre au créneau devant des
dizaines de journalistes et qui explique, point par point, la phase d'identification
de l'ovni. En marge du fantastique ouvrage qu'a accompli la SOBEPS sur la
vague belge ("Vague d'ovnis sur la Belgique - un dossier exceptionnel"
et "Vague d'ovnis sur la Belgique - 2 - une énigme non résolue"),
voici un résumé des réflexions du Colonel De Brouwer sur
l'implication et les révélations de l'armée : INTRODUCTION.
"Je dois avouer que j'ai quelque peu hésité lorsque la SOBEPS m'a demandé
d'apporter ma contribution à cet ouvrage. En effet, je ne suis pas spécialiste
ès OVNI et, en outre, il est assez délicat pour quelqu'un qui occupe une fonction
officielle de mettre sur papier ses vues personnelles sur un sujet si controversé.
Cependant, j'estime que je n'aurais pas été loyal envers la SOBEPS si j'avais
refusé. La Force aérienne a toujours joué cartes sur table à ce propos et je considère
cette postface comme un élément complémentaire du dossier exceptionnel rédigé
par les gens de la SOBEPS. Je suis en effet plein d'admiration devant l'engagement
énorme dont ont fait preuve tous ceux qui furent impliqués dans l'étude d'innombrables
témoignages et dans l'analyse de toutes les données techniques disponibles. Ce
fut un véritable travail de bénédictin, ingrat parfois, car ceux qui ont pris
cette affaire au sérieux n'ont pas été épargnés par les critiques. Cette postface
représente la vision de quelqu'un qui, de par sa fonction, fut concerné de très
près par la problématique des OVNI en Belgique. Cette vision est fondée sur un
nombre de constatations faites par la Force aérienne. Comme je n'ai pas pu omettre
des réflexions complémentaires et que j'ai souvent dévié de l'aspect purement
militaire et technique, je souhaite attirer l'attention sur le caractère personnel
de ma contribution qui ne reflète pas nécessairement le point de vue officiel
de la Défense." CONTEXTE.
"Rares sont ceux qui peuvent
approcher la problématique des OVNI de manière objective. Peu de sujets provoquent
effectivement autant de réactions controversées, allant de l'indifférence absolue
à l'intérêt passionné en passant par la plaisanterie ironique. Ce fut aussi le
cas pour l'implication de la Force aérienne dans certaines observations de type
OVNI décrites dans ce dossier. Certains milieux étaient étonnés et incrédules
de voir une instance officielle s'occuper d'une affaire qui, à première vue, semblait
absurde. (...) En me basant sur les multiples contacts que j'ai eus avec diverses
personnes, je diviserais l'attitude du citoyen moyen envers la problématique des
OVNI en quatre catégories: 1. La première catégorie
est constituée de ceux qui ne croient pas qu'une chose comme un OVNI puisse exister.
Ils attribuent les nombreuses observations à des phénomènes atmosphériques ou
astronomiques (...) 2. Un grand pas psychologique
est requis pour passer de l'attitude décrite ci-dessus à la deuxième catégorie
que je définirai comme celle regroupant ceux qui acceptent les observations d'OVNI,
mais qui excluent par définition toute hypothèse de leur origine extraterrestre.(...)
3. La troisième catégorie est constituée de ceux
qui sont persuadés de l'existence des OVNI et qui n'excluent pas l'hypothèse de
leur origine extraterrestre. Il s'agit en général de personnes qui ont effectué
une étude plus profonde de la problématique et qui, en conclusion, reconnaissent
la réalité des observations d'objets volants dont la nature et les performances
dépassent largement le domaine des capacités techniques acquises à ce jour. Ils
s'aventurent sur un terrain glissant pour la simple raison qu'ils posent une hypothèse
sans base scientifique stable.(...) 4. Venons-en
à la quatrième catégorie: les convaincus de l'origine extraterrestre des OVNI.
Partisans inconditionnels, leur conviction se fonde bien plus sur la croyance
que sur la connaissance approfondie du dossier des innombrables observations d'OVNI
relatées depuis le premier rapport de Kenneth Arnold (...) IMPLICATION
DE LA FORCE AERIENNE BELGE. " (...)
la Force aérienne peut en effet jouer cartes sur table pour la bonne et simple
raison qu'il n'y avait rien à cacher et qu'il était impossible du point de vue
technique qu'on eût affaire à un F-117. D'un autre côté, le sérieux des témoignages
et le professionnalisme de la SOBEPS étaient des éléments qui poussèrent la Force
aérienne à conclure à la nécessité d'une enquête plus approfondie. C'est la raison
pour laquelle il avait été décidé avant la tenue de la conférence de presse de
tenter d'identifier la nature et l'origine de certains phénomènes observés. La
grande question était, cependant, avec quels moyens?" LES
MOYENS. "Tout vol dans l'espace aérien
Belge effectué entre le coucher et le lever du soleil par n'importe quel appareil
doit faire l'objet d'une demande officielle et doit recevoir l'autorisation des
autorités de l'aviation civile et/ou militaire.(...) En plus des radars d'approche
des différents aérodromes, la Force aérienne dispose de deux puissants radars
de détection intégrés au système de défense de l'OTAN et opérationnels 24 heures
sur 24. (...) les faux signaux sont écartés. Ces derniers, mieux connus des contrôleurs
sous le nom de "engels" ou "anges" (...) Dans le cas des observations d'OVNI,
les contrôleurs radar étaient priés de porter une attention particulière aux échos
(même sur "raw video") qui apparaissaient aux environs des observations visuelles
au sol. Ainsi, un certain nombre d'échos radar furent relevés dont on ne savait
avec certitude s'il s'agissait "d'anges" ou de véritables appareils en vol.(...)
Après la première vague d'observations du 29 novembre 1989, la Force aérienne
a ordonné aussi bien aux contrôleurs radar qu'aux pilotes de combat d'être vigilants
et d'éventuellement passer à une procédure d'identification. A cette fin, seuls
les moyens existants, c'est-à-dire deux radars au sol et les F-16, devaient être
employés. Le but était de vérifier si les OVNI étaient réels ou non. Après confirmation,
on passerait au deuxième stade, identifier, et déterminer si la sécurité du trafic
aérien était menacée." ACTIONS.
"(...) la Force aérienne a entrepris un certain nombre
d'actions concrètes. Lors d'une première intervention le soir du 2 décembre, deux
F-16 ont été envoyés dans les environs de Liège où une éventuelle observation
avait eu lieu. (...)Puis, il y eut l'action de la nuit du 30 au 31 mars 1990 (...)
Dans ce cas-ci, la Force aérienne n'a réagi qu'après confirmation téléphonique
de la part de la Gendarmerie d'un certain nombre d'observations dans la région
de Wavre et après une observation simultanée par deux radars au sol. Les F-16
ont effectué plusieurs interceptions aidés par les directives du contrôleur radar
en service. Certaines données furent enregistrées par les radars de bord des F-16
(...) Les interférences sur les radars de bord sont pourtant généralement causées
par les conditions au sol alors que les enregistrements du 30-31 mars ont été
réalisés à environ 3 kilomètres d'altitude. En outre, on constate à certains moments
une corrélation entre les données provenant des deux radars de bord et d'au moins
un radar au sol. L'enregistrement de données identiques par trois systèmes différents
à des moments donnés nous pousse à ne pas exclure qu'un ou plusieurs appareils
non identifiés aient effectivement évolué dans l'espace aérien belge. (...) lorsqu'un
pilote verrouille son radar (lock-on) sur une cible éventuelle, une indication
du lieu où elle devrait se trouver s'affiche sur son viseur. Rien n'y a été relevé
par les pilotes lors des divers lock-on accomplis. Si ces cibles avaient été illuminées,
c'eût certainement été le cas. Est-ce la preuve qu'il n'y avait rien en l'air
et qu'il s'agissait de perturbations électro-magnétiques? Sûrement pas: les témoins
oculaires à Petit-Rosière ont déclaré que les points lumineux qu'ils observaient
ont, à un moment donné, perdu de leur intensité alors que les F-16 approchaient,
pour même s'éteindre complètement. (...) En tout cas, la Force aérienne en est
arrivée à la conclusion qu'un certain nombre de phénomènes anormaux se sont produits
dans l'espace aérien belge. Les innombrables témoignages d'observations au sol
rassemblés dans ce livre, renforcés par les relevés de la nuit du 30 au 31 mars,
nous ont amené à envisager l'hypothèse qu'un certain nombre d'activités aériennes
non autorisées ont bien eu lieu. (...)". LA
COOPERATION ENTRE LA FORCE AERIENNE ET LA SOBEPS. "Dès
les premières observations d'OVNI les responsables de la SOBEPS ont officiellement
demandé d'avoir accès aux données de la Force aérienne en la matière. Se basant
sur le fait que les autorités nationales n'avaient rien à cacher, la Défense a
donné l'autorisation de divulguer les données disponibles afin de permettre une
enquête scientifique. Cette attitude a suscité quelque étonnement dans certains
milieux nationaux et internationaux. En effet, c'était apparemment la première
fois depuis la naissance de la problématique des OVNI que les autorités militaires
ont décidé de collaborer avec une association de spécialistes dans le domaine
des OVNI. (...)". CONCLUSION.
"La Force aérienne aurait-elle pu faire plus? Sans
doute, mais uniquement à condition d'un effort particulier et de l'engagement
de plus de moyens et de personnel. N'oublions pas que le phénomène OVNI surgit
à des endroits et dans des conditions imprévisibles. La mise en oeuvre d'un réseau
étanche d'observateurs, de lunettes optiques spéciales, de caméras infrarouge,
de moyens de communication, d'hélicoptères et d'avions aurait exigé un effort
financier énorme. Un tel effort ne peut être justifié sans la preuve qu'il s'agit
effectivement d'objets volants qui pourraient constituer une menace éventuelle
pour la population et pour le trafic aérien ou qui soient vraiment d'origine extraterrestre.
Le dilemme est le suivant: comment peut-on identifier ces OVNI sans l'engagement
de moyens supplémentaires alors qu'une telle identification est la condition sine
qua non pour justifier leur engagement. Le jour viendra sans doute où le phénomène
sera observé avec des moyens technologiques de détection et d'enregistrement qui
ne laisseront aucun doute quant à son origine. Ceci devrait lever une partie du
voile qui couvre le mystère depuis longtemps. Un mystère qui reste donc entier.
Mais il existe, il est réel, et c'est déjà une conclusion importante. " |